On va être clairs : en lisant LinkedIn cinq minutes, on pourrait croire que l’intelligence artificielle a déjà transformé le recrutement, les RH, la gestion des talents et tout ce qui touche aux fonctions humaines.
Les prestataires promettent un monde magique : « recrutement sans biais », « sélection automatisée », « adéquation culturelle prédictive ». La réalité est tout autre. On n’y est pas. Même pas proche.
Ce que nous constatons chaque jour chez Jobprofile
De nombreuses entreprises nous contactent, motivées à intégrer des solutions IA dans leurs processus de recrutement. Mais elles se rendent vite compte d’une chose : sans discernement humain, les résultats restent décevants. Ce sont celles qui combinent l’IA avec une vraie expertise RH qui obtiennent les meilleurs résultats. Pas celles qui espèrent compenser des pratiques déjà bancales par la technologie.
Ce que l’IA permet déjà
Il faut reconnaître ce qu’elle sait faire. Aujourd’hui, l’IA permet de :
- Traiter des centaines de candidatures en quelques secondes
- Réaliser des présélections sur des critères simples
- Répondre aux questions de base via des chatbots
- Automatiser certains aspects de l’intégration des nouveaux collaborateurs
Des plateformes comme HireVue, Pymetrics ou Phenom apportent de vraies améliorations dans la gestion administrative ou les premières étapes du recrutement.
Ce que l’IA ne sait toujours pas faire
Ce qu’on lit rarement dans les plaquettes commerciales des éditeurs :
- Le biais est intégré.
L’IA n’élimine pas les biais. Elle les apprend à partir des données historiques. Et si ces données sont biaisées (ce qui est souvent le cas), l’IA les reproduit. Amazon a dû abandonner un outil de recrutement qui défavorisait systématiquement les femmes. Ce n’était pas une exception. C’était structurel. - Elle génère des erreurs crédibles.
Les modèles génératifs comme ChatGPT peuvent produire des réponses très convaincantes… mais fausses. Imaginez un chatbot RH qui donne des informations erronées sur les salaires, les obligations légales ou les conditions de travail. - Elle ne comprend pas la nuance.
L’IA ne sait pas évaluer les compétences comportementales, le potentiel managérial, la capacité d’adaptation ou l’alignement culturel. Ce sont des dimensions humaines qui demandent de l’expérience, du contexte, et de l’échange. - Elle prend des décisions opaques.
Beaucoup de systèmes fonctionnent comme des boîtes noires. Comment expliquer à un·e candidat·e pourquoi il ou elle a été rejeté·e par l’algorithme ? Bonne chance.
Ce qui reste non négociable : le facteur humain
Chez Jobprofile, nous obtenons les meilleurs résultats lorsque l’IA est utilisée comme un assistant, jamais comme une autorité.
Voici ce que font les équipes RH les plus lucides :
- Elles auditent régulièrement leurs outils IA pour détecter les biais ou les dérives
- Elles construisent des jeux de données plus représentatifs
- Elles gardent toujours une validation humaine dans les décisions finales
- Elles considèrent l’IA comme un outil d’aide à la décision, pas un remplaçant.
Ce que l’humain sait encore faire, et que l’IA ne fait pas
- Lire entre les lignes d’un parcours ou d’un discours
- Détecter l’alignement avec la culture de l’entreprise
- Évaluer les dynamiques relationnelles, le potentiel d’évolution
- Adapter son jugement aux réalités spécifiques de l’organisation.
L’avenir sera hybride, pas automatisé
L’IA a toute sa place dans l’évolution des RH, mais son intégration doit être critique et progressive. Ce que l’on verra dans les prochaines années :
- Des modèles d’IA plus transparents et explicables
- Des règles de conformité plus strictes
- Des combinaisons plus intelligentes entre l’humain et la machine
- Une gouvernance de l’IA plus éthique et mieux encadrée
Conclusion
L’IA ne remplacera pas les recruteurs. Mais elle mettra en lumière ceux qui ne se remettent pas en question. Ceux qui se reposent sur des process rigides. Ceux qui délèguent à la technologie des décisions qui demandent de la finesse, de l’écoute et du bon sens.
La véritable opportunité est là : les professionnels RH qui sauront combiner outils technologiques et pensée critique seront ceux qui réussiront demain.